Un proverbe bien connu dit : « Donne un poisson à quelqu’un qui a faim, et il sera rassasié une fois. Apprends-lui à pêcher, et il n’aura plus jamais faim ». Mais cet adage a lui aussi une faille. Car parmi le groupe ethnique indigène Ngäbe au Panama, les programmes de développement échouent régulièrement, même les bons efforts de formation donnent peu de résultats. Un puits sans fond, mais où un engagement chrétien global peut apporter de l’espoir et un changement durable.
Je suis assis avec d’autres sous le petit auvent d’une cabane pour participer à une formation. Chicho, un ami du village, m’y a invité. Il me conseille toujours sur les questions agricoles et savait que le thème « Pulvérisations biologiques » m’intéresserait. Grâce au long confinement au Panama, j’ai eu l’occasion d’installer une petite ferme à la maison et de « devenir un petit paysan pour les petits paysans d’ici » à l’instar de Paul (cf. 1 Corinthiens 9:20-22). Depuis, un chien et des poules font partie de notre inventaire, ainsi que de nombreuses plantes.
UN ANCIEN ENFANT DE MISSIONNAIRES DE RETOUR AU PANAMA
Il y a quatre ans, nous nous sommes installés en famille au Panama. Nous y vivons actuellement chez les Ngäbe qui, avec plus de 300’000 personnes, représentent le groupe ethnique indigène le plus important et le plus pauvre du pays. Comme j’ai grandi dans le pays en tant qu’enfant de missionnaires, je connaissais déjà un peu la région Ngäbe. Nous nous étions bien préparés avant de partir, mais nous n’avions guère de connaissances agricoles.
LE SEUL À METTRE QUELQUE CHOSE EN PRATIQUE
Lorsque je rencontre Chicho quelque temps plus tard, je demande s’il a déjà concocté un tel produit de pulvérisation. Il répond par la négative. Manifestement, il n’avait pas l’intention d’utiliser ce qu’il avait appris. Il en va de même pour les autres personnes que j’interroge. Je me rends compte que je suis probablement le seul à avoir fait quelque chose de ce que j’ai appris. Alors pourquoi les gens vont-ils à ces formations ? Uniquement pour la nourriture gratuite ou parce qu’ils reçoivent quelque chose d’autre ? Malheureusement, ce n’est pas un cas isolé. Les gens aiment certes suivre des programmes de formation, mais ils ne mettent souvent pas en pratique ce qu’ils ont appris.
POURQUOI DES PROGRAMMES ÉCHOUENT
Nous sommes convaincus que la transmission d’une aide purement matérielle ne sert pas à grand-chose, car elle ne fait que créer des dépendances malsaines. Des programmes d’éducation seraient bien plus efficaces. On dit qu’il faut donner une canne à pêche aux pauvres au lieu de distribuer des poissons. Mais il est évident que cette sagesse a aussi son revers : chez nous du moins, il semble que le fait d’apprendre aux autochtones à pêcher ou à faire autre chose n’ait que peu d’effet. Les raisons sont multiples.
Au sens figuré, les Ngäbe n’ont pas besoin de cannes à pêche occidentales, car ils savent très bien pêcher à leur manière. À leur manière, c’est peut-être un peu différent et plus lent, mais ils ont tout le temps du monde. Leur problème ne réside pas dans le manque de matériel ou de savoir-faire, mais dans un ensemble complexe de facteurs qui les maintiennent dans le désespoir et la pauvreté. Ils vivent par exemple toujours dans un système d’exploitation et de discrimination de type colonial. À cela s’ajoutent, entre autres, des éléments de leur propre culture et de leur façon de penser, par exemple un individualisme marqué ou certaines traditions.
L’AIDE AU DÉVELOPPEMENT DURABLE COMMENCE PAR UNE NOUVELLE FAÇON DE PENSER
Conclusion : la simple transmission de connaissances n’a que peu d’effet, tout comme l’aide matérielle. Ce qu’il faut, ce sont des processus d’accompagnement qui s’attaquent à la pensée des gens et qui donnent l’espoir que le changement est possible. La Parole de Dieu offre une base géniale pour cela. C’est pourquoi nous encourageons tout d’abord les églises à s’engager en faveur d’une transformation profonde, tant au niveau personnel (formation de disciples) qu’au niveau de la société.
De plus, un réseau étendu de groupes d’entraide doit être mis en place pour accompagner les personnes dans les processus de changement. L’une des clés d’un développement durable réside pour nous dans le fait que dès le début, nous travaillons en impliquant les autochtones. Avec eux, nous voulons nous engager à apporter la Bonne Nouvelle en paroles et en actes aux plus pauvres du Panama.